Canarienne, canarien d’un jour, bonjour!
Aujourd’hui nous y sommes, les Îles Canaries. Avouez que vous aussi vous pensez aux oiseaux du même nom pour l’étymologie de l’île …et pourtant non. Ce nom cache une signification bien différente. Déjà à l’époque romaine, les îles s’appelaient Canariae, car l’on pensait que les îles étaient habitées par des chiens sauvages : en latin Canis.
Pour notre première île, ce sera Lanzarote. Pour vous situer, Lanzarote est la plus orientale et la plus septentrionale des Îles Canaries, à seulement 115 km à l’ouest des côtes africaines, 958 km au sud-est du Portugal. L'île mesure environ 65 km de long pour 20 km de large et 670 mètres d’altitude aux Penas del Chache. La côte, pour la plupart rocheuse s’enorgueillit de ses 26 km de plages qui s’étirent sur 213 km, avec du sable doux comme un nuage de coton qui semble provenir directement…du paradis !
L’île figure également comme la plus volcanique des sept îles des Canaries appartenant à la province de Las Palmas. Avec ses 170,000 habitants, elle se classe bonne troisième île des Canaries par sa population, après Grande Canarie et Tenerife que nous verrons demain et après-demain. Couvrant 845,94 km2, elle occupe la quatrième île de l'archipel pour sa superficie. De son côté, le nom de cette île viendrait du marin italien génois Lancelot Maloisel qui visita l'île au xive siècle (rien à voir avec le célèbre chevalier de la bande dessinée que vous connaissez peut-être ‘’Lancelot’’).
Notre arrivée s'effectue à Arrecife, la capitale de l'île. Notre guide d'un jour se nomme Cayetano et notre chauffeur Alexandro.
Coup de théâtre! Ici, un paysage digne des documentaires ‘’scientificogéologiques’’ lunaires mais personne ne porte la combinaison des astronautes. Non, non, on a bien les deux pieds sur terre ou, plutôt sur de la roche volcanique vieille à certains endroits de 22 millions d’années. Plus on avance, plus on constate que des cratères, des ravins et des vallées de lave solidifiée, fera office de paysages pour cette excursion…à notre plus grand étonnement mais surtout à notre plus grand ravissement. Déjà, on approuve le comité de la Réserve de biosphère de l’UNESCO de l’avoir inclut dans ses rangs en 1993.
Ici, Lanzarote adopte le climat de l’éternel printemps. Ses douces conditions climatiques ont peut-être à voir faisant d’elle l’île la mieux préservée des Canaries, avec ses typiques maisons basses de couleur blanche au toit plat légèrement incliné pour récupérer l’eau de pluie qui se veut rare (200 millimètres annuellement mais au vent constant) sur cette petite île au large du Sahara occidental habitée depuis au moins deux millénaires. Mais aujourd'hui, le vent est bien présent. Le sirocco (aussi appelé calima aux îles Canaries) souffle parfois violemment, provoquant des tempêtes chargées de sable du désert. Autre particularité de cette Lanzarote, Cayetano mentionne qu’un tunnel de l'Atlantide, qui se trouve non loin des côtes de Lanzarote, constitue le tunnel de lave sous-marin le plus long du monde. Et pour en ajouter : si on avait le temps, on compterait environ 50 volcans et 300 cratères. Mama mia! Tant de caractéristiques pour cette petite île à première vue, d’allure austère. Pas étonnant que des champs de lave crevassés s’étirent à perte de vue, avec pour simple végétation de petits lichens, pionniers d’une renaissance végétale. Ils sont pratiquement les seuls protagonistes de l’inhospitalière surface volcanique, sur laquelle ils font face à la puissance des alizés (vents) bien que cinq espèces endémiques y ont été recensés par des spécialistes.
Nous entreprenons d'abord, la route pour atteindre le parc national de Timanfaya créé en 1974, où se produisent d’impressionnants phénomènes géologiques. Saviez-vous qu’au sein du réseau espagnol des parcs nationaux, il est le seul à posséder un caractère foncièrement géologique, où sont nées des éruptions volcaniques qui eurent lieu entre 1720 et 1736, et en 1824(dernière éruption)? Les éruptions majeures ont touché 11 villages et ont eu lieu pendant une durée de six ans du 1er septembre 1730 au 16 avril 1736 et ont recouvert environ 167 km2 de Lanzarote. Imaginez, en tenant compte de la quantité de lave rejetée et, de la durée de ces éruptions, celles-ci figurent parmi les éruptions les plus importantes de l'histoire du volcanisme. La coulée de lave s'étendait sur plus de 14 km. Et vous savez ce qu’on raconte? Les habitants du village empruntèrent la statue de la vierge Virgen de los Dolores au village de Tinajo et formèrent une procession pour aller à l'encontre de la lave en fusion. Et tout à coup, un miracle se produisit et la lave se figea juste avant d'atteindre la première maison du village !!! Il reste aujourd'hui une terre composée de lave et de cendre. Des agriculteurs parviennent à cultiver des légumes. Étonnamment, ces sols d'apparence aride sont très fertiles.
Au bâtiment principal du parc, une démonstration de l'intensité des sources chaudes souterraines nous laisse sans voix. Un peu d'eau dans l'un des trous et voilà que jaillit un nuage de vapeur de 600 degrés sur plus de deux mètres. Puis, en entrant vers le restaurant, on s'apercoit que le chef possède une drôle de cuisinère. Les cuisses et les poitrines de poulet déposées sur le grill utilisent directement la chaleur de la terre à 250 degrés. Autres lieux , autres ...BBQ!
Ici, à ce belvédère, sans le ciel bleu intense, beaucoup de nos photos prises à Timanfaya pourraient avoir été prises sur la lune ou mieux, sur Mars. Observez-les de près ci-bas. Pas mal non? Mais nous n'avons pu y accrocher nos émotions, notre étonnement, notre bonheur devant ces paysages.
Puis, nous entreprenons la route des volcans dans le parc. Seul les autocars y ont accès. Il y a quand même des avantages aux voyages de groupes, en plus d'avoir passé devant les voltures en entrant dans le parc. Nos yeux nous dévoilent des panoramas d'une beauté d'un autre monde. Pas étonnant d'apprendre que les astronautes de la NASA viennent s'y entraîner et que des scientifiques de diverses disciplines complètent des thèses de leur domaine spécifique ici-même. Les mots ne sauraient décrire la magnificience de ces paysages. En plus, nous avions droit à une présentation didactique préenregistrée du parc avec musiques donnant tantôt l'impression d'une éruption, tantôt, une musique scrutant l'esprit méditatif et serein des lieux. Une expérience digne ...des anges et des dieux à la fois. Nous en sommes tous sortis éblouis et ...un peu étourdis avec ses dizaines de courbes ultra serrées...pour un véhicule de ...45 pieds.
Les volcans, de type hawaïen, et les champs de laves vierges de ce parc national englobent 5 000 hectares et 25 cratères dont on a vu quelques échantillons. On nomme le territoire recouvert par les pluies de cendre la Valle de la Tranquilidad (vallée de la tranquillité)!
Un arrêt aux vignes de la Geria nous a dévoilé un spectacle étonnant qui incarne l'ingéniosité des habitants de l'île face à un environnement aride et volcanique. Pour protéger les vignes des vents forts des Alizés et, de la chaleur intense, les Lanzaroteños et les Lanzaroteñas, ont développé une technique innovante. Ils creusent des fosses circulaires appelées hoyos dans le sol, les remplissent de cendres et de pierres volcaniques, puis plantent les vignes dans ces petits cratères. Ces parterres de vignes affichent de minuscules paysages lunaires. Leurs murs de pierre semi-circulaires, connus sous le nom de zocos, protègent les plants des éléments tout en capturant l'humidité de l'air de l’eau condensée par la variation des températures entre la nuit et le jour.
Et bien trêve de bavardage et allons goûter à ce produit vinicole chouchouter à la viticulture Bodega. Le produit final, un muscadet surprend nos papilles, un produit sucré inconnu de nous tous ou presque. D'autres ont opté pour un vin blanc sec tellement léger que notre collègue Denis pensait qu'il avait plutôt bu de l'eau. Une boutique de produits locaux artisanaux de lave, bijoux et autres, complète notre visite.
On ne pouvait pas passer à côté de ce qui est considéré comme l'une des merveilles de la nature de Lanzarote, le Lago Verde, également connu sous le nom de Charco Verde, ou Lagune des Clics. Nommée ainsi en raison de la couleur verte de ses eaux, dotée grâce au phytoplancton, et aux différents sulfures, et aux minéraux et, à la grande quantité de microorganismes uniques (algues en suspension) qui habitent cet endroit; on découvre ici une plage de sable noir qui, avec la couleur verte du lac et de la mer, crée un paysage impressionnant plein de contrastes étonnants qui laissent des images pittoresques sur nos téléphones et tablettes! Joli non?
Côté culturel, l'artiste canarien César Manrique (1919-1992), a érigé d'importantes œuvres d'architecture d’art moderner canarien à Lanzarote. Grâce au travail, entre autres de cet artiste local, Lanzarote demeure l’île la mieux préservée des Canaries. On le dit pionnier de l'écologie avant l’heure avec une vision extraordinaire de la relation entre la nature et l'homme, un hommage aux îles Canaries et à sa terre natale. Son œuvre la plus connue; le Mirador del Río édifié en 1973, belvédère situé sur les falaises de Famara, le Jardin des Cactus et, plusieurs installations touristiques. Plusieurs livres sur ses oeuvres étaient présentées dans les boutiques.
Au cinéma, voyons si vous vous rappeler de certains films. L'île a servi de cadre au film Étreintes brisées, de Pedro Almodóvar, également à certaines parties de Rien à foutre. Elle a été le lieu de tournage des films Enemy (1985), Krull (1983), Un million d'années avant J.C. (1966), du téléfilm L'Île mystérieuse par Juan Antonio Bardem et Henri Colpi (1972) et de La Route de Salina de Georges Lautner (1971), près des salines de Janubio. Elle a également servi aux décors du film d'horreur franco-espagnol Cold Skin de Xavier Gens, d’après le roman espagnol La Peau froide (La piel fría) d'Albert Sánchez Piñol (2002). Et d’autres plus connus : Voyage au centre de la terre, l’Île mystérieuse, la Planète des singes, le Choc des Titans.
En conclusion, la quasi absence de végétation, l’extrême rugosité des formes, la variété des couleurs, les silhouettes des volcans et la côte abrupte confèrent à Timanfaya une beauté ahurissante. On y retrouve des spectacles visuels les plus pittoresques des Îles Canaries. Inaltérée par la main de l'homme, ni la végétation ni le climat n'ont eu le temps de modifier la beauté pure de cette terre rouge et de jais de la réserve de la biosphère de l'UNESCO! Chapeau Lanzarote!
On voulait laisser Johanne et Denis ici, nos athlètes de la bicyclette, mais ils ont décliné notre invitation...trop venteux paraît-il!
Quelle belle excursion ce fut. Voyage Louise Drouin a l’art de nous amener là où la nature est à son meilleur!
Demain, on poursuit notre tournée des îles avec Gran Canarie.
On espère que vous passez une belle nuit de Noël en ce 24 décembre!
Bonne nuit!
Lucie
PS 1 Pendant l'Antiquité, l’île est visitée puis fréquentée par des marchands et navigateurs phéniciens qui viennent y chercher l'orchilla (un lichen maritime filamenteux), la précieuse plante pour teinture rouge pourpre, qui pousse sur les roches du nord de l'île.
PS 2 L'élevage de cochenilles (insecte) dans les plantations de figuiers de Barbarie, se développe lors de la deuxième moitié du xixe siècle. De cet insecte est extrait le carmin (un rouge vif), un colorant naturel connu dans le monde entier et utilisé dans les secteurs de la cosmétique, de l’alimentation ou du textile. Un produit qui bénéficie d’une appellation d'origine protégée et qui habille le monde de couleur depuis les îles Canaries mais qui est aujourd'hui en déclin en raison de la concurrence internationale.
PS 3 Pendant la seconde moitié du xvlll siècle, on introduisit la culture de la soude, plante rampante riche en alcalis qui s'utilisait dans la fabrication du savon.
PS 4 Une de ses villes, Charco del Palo, est entièrement nudiste. Le village héberge la majorité des naturistes de l'île. Le nudisme est aussi pratiqué sur plus d'une dizaine de plages. Ce qui se passe sur l’île…reste sur l’île !
PS 5 Lanzarote constitue le cadre principal du récit homonyme de l'écrivain français contreversé de cette décennie, Michel Houellebecq, vous connaissez?
PS 6 L'écrivain et journaliste portugais José Saramago, prix Nobel de littérature en 1998, a vécu sur l'île.